Exit Ballmer, la fin d’un marketing décomplexé ?

Actualités - Société - Posté on 24 Août 2013 at 10:43 par Solange Belkhayat-Fuchs

Le flop de Windows 8 /Surface aura eu raison de « l’Autre » patron historique de Microsoft. Steve Ballmer quittera la direction de l’entreprise dans les 12 prochains mois, après y avoir émargé durant plus de 33 ans. Sa fortune personnelle est estimée à plus de 15 milliards de dollars, il demeure l’un des principaux actionnaires de la Windows Company. Il laisse également aux autres actionnaires un trésor de guerre de 77 milliards de dollars, jalousement conservés et réinvestis par l’entreprise.

L’Autre, et non pas Le timonier de Microsoft. Gestionnaire volontaire,il cachait, sous un sourire jovial une rigueur pouvant aller jusqu’à la brutalité, « <i> dans notre pays, nous avons des lois contre des gens comme vous </i>» lança-t-il un jour à un journaliste un peu trop curieux … Adulé des « commerciaux », craint des techniciens, son règne fut marqué par la perte de personnalités marquantes comme de successeurs potentiels, le départ notamment de Jim Allchin ou Ray Ozzie.

L’Autre, et non pas Le timonier de Microsoft, jamais il ne parviendra à faire preuve d’autant de charisme que son prédécesseur. William Henry Gates III parlait à ses développeurs et partenaires avec un langage bien à lui, avec des mots « d’homme du sérail », conservant, dans ses complets mal coupés et ses impossibles paires de lunettes, un vernis geekesque. Gates savait juger un homme très rapidement, et s’entourait de talents qui profiteraient tôt ou tard à l’entreprise, quand bien même ce talent ne correspondait pas au profil d’informaticiens performants en complet-cravate. « Bill » parti, le temps des gourous et des divas s’achève, celui du « trait de génie » également. Certes, la logique d’entreprise et les impératifs de gestion d’une multinationale étaient déjà très éloignés du monde des krosofties des tous débuts. Mais les apparences étaient encore sauves.

On ne peut s’empêcher de penser à l’autre départ d’un autre « gestionnaire-qui-n’était-pas-le-gourou-technique », Steve Jobs d’Apple, qui a longtemps joué le rôle de l’Autre comparé à Wozniak. Un Jobs qui a su ne pas sombrer dans la jovialité exubérante, entretenant son image de marque et faisant de celle de l’entreprise un objet de culte réservé à une « élite de consommateurs ».

Ballmer a marqué la fin des « fuites organisées » et du teasing Windowsien, remplaçant la politique des petites phrases et des confidences savamment distillées par d’interminables campagnes « Beta Marketing ». Il y perdra beaucoup d’audience grand public, mais y gagnera également beaucoup sur le créneau de l’informatique d’entreprise : la famille Windows Server détient aujourd’hui une position quasi monopolistique- ainsi que sur le marché du Cloud Computing grâce au développement d’Azure.

Il laisse une entreprise avec une image de marque sérieusement écornée sur le créneau de la grande consommation, battue en brèche par Apple et surtout Google sur les fronts de la téléphonie mobile et des tablettes. Ballmer aura-t-il l’audace, même pour une courte période de transition, de demander à Gates de revenir à la barre, pour rendre à « krosoft » l’élan d’inventivité et la part de rêve qui a disparu avec lui ? La recette a bien marché pour Apple, mais elle a coûté cher à certains amours-propres.

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