Microsoft absorbe Nokia téléphonie : Mariage (en) blanc ?

Fusion-acquisition - Stratégie - Posté on 04 Sep 2013 at 3:57 par Solange Belkhayat-Fuchs

Prix de vente 7,17 milliards de dollars, soit 5,4 milliards d’Euros, dont 1,6 milliard de droits d’exploitation non exclusive de certains brevets. Le rachat de la branche téléphonie mobile de Nokia par Microsoft se traduisait par une baisse de 4,5% de l’action Microsoft et de +45% de celle de Nokia. Le Finlandais se débarrasse d’une division qui avait connu des jours meilleurs et, par la même occasion, de plus de 32 000 salariés, laissant au cœur historique de l’entreprise la liberté de se concentrer sur ses activité réseau.

Pour Microsoft, cette opération écorne à peine son trésor de guerre (77 milliards de dollars) et pourrait peut-être lui apporter quelques recettes de cuisine pour réussir enfin à percer dans le domaine de la téléphonie cellulaire. Mais la téléphonie chez Nokia n’est plus que l’ombre d’elle-même, elle qui s’est accrochée trop longtemps à un noyau Symbian alors que tous les indicateurs prouvaient que la « vérité » était du côté d’IOS et d’Android.

Microsoft, pour sa part, semble avoir encore du mal à comprendre l’idée même de mobilité, par trop centré sur une culture d’entreprise purement logicielle/noyau. Lorsqu’un Nathan Myhrvold décide, à l’aube de l’ère Windows 95, de créer un formidable réseau mondial baptisé « the Microsoft Network », alias MSN, et de devenir potentiellement le plus important fournisseur d’accès Internet du monde, l’expérience est avortée et le projet est revendu appartement par appartement, à des opérateurs historiques qui s’empresseront d’augmenter les tarifs en sabrant le champagne : leur adversaire le plus dangereux cessait d’exister. Yahoo soupirait d’aise. Myhrvold avait compris à l’époque ce que deviendrait Internet, mais Gates et Ballmer espéraient en faire une vache à lait de vente de services payants à l’image du Minitel. Myhrvold avait compris qu’il fallait donner beaucoup et « vendre l’idée du tout gratuit » pour mieux récolter par la suite. Mais la logique du microbilling des opérateurs appliquée à la vente de programme, c’était trop nouveau à l’époque pour la Direction de « Corp », qui continuera à croire en l’unicité du schéma classique du cybercommerce : un portail, une transaction de vendeur à acheteur (une architecture qui n’offrait aucun bénéfice ou si peu au constructeur de terminaux).

Lorsque Microsoft invente la notion de tablette (par quatre fois au cours de son histoire), l’outil est cantonné à une clientèle professionnelle, les tarifs sont jalousement ancrés dans le haut de gamme. Et les rares tentatives d’ouverture vers de grand public d’une tablette « pour monsieur toutlemonde » (Midori) visaient une classe de yuppies et cadres supérieurs capable de s’offrir au prix du platine en lingot des demi-tablettes aux fonctions limitées.

La téléphonie a suivi les mêmes errements tant technologiques que commerciaux. Né du projet Pegasus rebaptisé Windows C.E., le système d’exploitation embarqué aura toujours de glorieuses visées… mais des tentatives de transformation abâtardies. Jamais, avant le lancement de Surface, Microsoft n’acceptera de s’investir sur le marché de la mobilité autrement qu’en fabricant du noyau et en laissant l’initiative de la production à des OEM. Même fabriqué par Samsung, Google vend sous la marque Google… attitude encore plus tranchée de la part d’Apple qui jamais n’acceptera de voir fleurir des clones et compatibles iPhone. Et l’intérêt d’un ancrage de la marque avec un produit. Est-ce par le rachat d’une entreprise moribonde que la culture d’entreprise Microsoftienne changera ? A suivre … Windows Phone, issus des amours étranges entre un noyau limité et verrouillé (Windows CE) et d’un système d’exploitation pur fruit (Windows 7 puis 8 en version embarquée n’a pas franchement su faire décoller l’idée d’un véritable « Microsoft Market » comparable à Google Play ou Apple ITunes Store. Est-ce qu’en absorbant des chaines de production et des brevets technologiques, Microsoft parviendra-t-il enfin un jour à retrouver une image de « magicien technologique » ?

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