Mort prochaine du Wifi : des drogues dures pour soigner ? (chap. 2)

Actualités - Réseau - Posté on 04 Juil 2012 at 10:19 par Solange Belkhayat-Fuchs

Mais fort heureusement, une équipe de chercheurs Suédois vient à la rescousse avec une idée totalement révolutionnaire (farfelue disent certains) pour un spécialiste traditionnaliste des rayonnements HF : appliquer au domaine des transmissions radio un raisonnement que l’on utilise en émission dans le domaine de la lumière (et notamment en transmission quantique avec des Qbits polarisés sous un angle ou un autre) : la différentiation, à l’émission comme à la réception, de « plans » d’ondes reposant sur des mouvements angulaires orbitaux différents. Il serait ainsi possible d’effectuer, sur une même fréquence, une sorte de « multiplexage par spin » ou par angle de phase de plusieurs signaux transmis simultanément sur une même fréquence. Un peu comme l’on parvient déjà aujourd’hui à utiliser une même antenne avec deux émissions polarisées à 90° l’une de l’autre. En théorie, ça peut fonctionner, car aucune loi ne vient contredire le fait que ce qui peut être exploité dans le domaine de la lumière (donc de l’ordre du TeraHertz) peut l’être également dans les fréquences basses de l’ordre du millier de MégaHertz.

La première publication grand public parue dans la revue ExtremeTech a provoqué une levée de boucliers… surtout après que les lecteurs aient vu les photographies du « moyen technique » utilisé pour filtrer les « spin » présentant un angle particulier : une simple antenne parabolique découpée et tordue, posée sur un balcon. La lecture des commentaires suivant l’article en dit long sur l’âpreté du combat, auquel le chercheur Suédois Bot Thidé rend coup pour coup.

Un regard plus attentif à la publication elle-même, parue dans le « New Journal of Physics » pourrait-il alors rendre plus claire l’explication physique forcément déformée par ces journalistes techniques qui n’y connaissent rien ? Après quelques jours d’analyse et de travail de bénédictin, la réponse n’est guère plus évidente.

Sur la « faisabilité » théorique d’un tel procédé qui améliorerait donc la bande passante des réseaux sans fil, les chercheurs sont plus ou moins d’accord : çà peut tomber en marche. On peut lire à ce sujet un court mémoire du Cnes estimant que « dans le domaine RF, il était possible de générer des ondes électromagnétiques possédant un moment angulaire orbital donné à partir d’antennes réseaux ». Sans trop préciser comment calculer puis fabriquer lesdites antennes réseau. Et s’il est un domaine complexe en radioélectricité, c’est bien celui de la conception et de la réalisation des antennes. Mais revenons sur une possible explication du miracle Suédois

Si l’on considère qu’un plan d’onde sur 2, 4 GHz utilise des photons, les calculs d’énergie utilisés dans le domaine des photos « optiques » s’appliquent également. Interrogé sur le sujet, un spécialiste a répondu* à cette question en estimant que l’énergie sur 2,4 GHz (et en partant du principe que la formule de Planck soit toujours valide), à 9,9E-6 électrons-Volt (contre 2 électrons-Volt dans le domaine optique, soit un niveau considérablement plus faible). La sélection des fronts d’ondes « pas optiques » en fonction de leur angle (le démultiplexage de phase) s’effectue par filtrage. Ce qui est tout à fait envisageable, précise une communication de l’IEEE, laquelle nous plonge dans un univers de vorticité et de tirebouchonnage de plans d’ondes (dit « moment angulaire orbital »), et qui conclut que le gain par rapport à un procédé MIMO serait quasi nul. Mais le « c’est possible » de l’IEEE ne donne pas, lui non plus, la moindre explication pratique pour fabriquer ce filtre miracle, et appuie ses hypothèses sur les principes de ce qui est déjà connu en optique.

Car c’est précisément ce filtrage d’angles (en fait de phase du signal sur un plan d’onde donné, et à une distance précise entre émetteur et récepteur) que l’équipe Suédoise prétend effectuer à l’aide d’une antenne parabolique torturée à coups de scie à métaux et de foyer déformé. Sur de plus hautes fréquences, où les imperfections de surface du réflecteur deviennent critiques, le remède serait probablement pire que le mal. Et sur ce point, les équipements radioélectriques actuels ne savent pas comment ne s’intéresser qu’aux plans d’ondes dont la phase serait, par exemple, précisément de 45, 90, 135 ou 180°.

Mais la véritable question est : « est-ce que cela fonctionne ? » Fi donc ! Le propos est d’une vulgarité sans pareille. Pour l’heure, ce qui importe, c’est que la théorie puisse être reconnue. L’exploitation mercantile du procédé, et surtout les renseignements précis permettant à tout un chacun de pouvoir reproduire et améliorer l’expérience de manière précise ne concernent pas ces grands théoriciens. Nous voilà renseignés, le Wifi meurt au moins instruit des raisons de sa mort et du fait qu’un remède aurait pu le sauver… remède dont on ne sait encore s’il sera concocté un jour par les apothicaires modernes de l’électronique. Franchement, on se sent plus fort avec tout ce savoir. Et si nous étions taquins, nous pourrions demander à l’équipe du professeur Bot Thidé si sa théorie peut être vérifiée et appliquée aux fréquences du SuperWifi sur la bande des 800 MHz, voir sur des fréquences encore plus basses situées entre 3 et 30 MHz. Voilà qui pourrait résoudre d’un coup de baguette magique tous les problèmes d’encombrement du spectre radioélectrique et envoyer les fonctionnaires de l’Agence Nationale des Fréquences gonfler les rangs des demandeurs d’emploi.

NdT Note de la Correctrice : lequel spécialiste nous a tout de même assuré que si la formule de Planck E=h.c/lambda = h.f fonctionnait, avec h = planck = 6.62E-34 et 1 eV = 1.6E-19 joule, à 2,4 Ghz, on a des photons de E = 6.62E-34 * 2,4E9 = 1.5888 × 10-24 J = 9.9E-6 eV. Tu lâches çà dans un dîner mondain, et tout de suite les esprits se calment et les regards se fixent sur toi. Merci à Sébastien f4grx sans qui nous aurions risqué d’encore moins bien comprendre tout çà… et la suite.

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