Problème matériel : Les moustaches qui tuent

Actualités - Technologie - Posté on 04 Mai 2010 at 7:47 par Solange Belkhayat-Fuchs

Ha.ckers découvre avec émotion l’existence des fameuses « moustaches » qui se développent sur les cartes électroniques utilisant de la soudure « sans plomb » (directive RoHS (2002/95/CE)). Un phénomène de cristallisation relativement connu des électroniciens de nos jours, mais qui a provoqué quelques pannes sur des équipements embarqués (satellites notamment) et centres de données, ainsi l’expliquent quelques documents de la Nasa. Une approche plus technique sur les causes et origines des moustaches d’étain est proposée par Tyco dans un document (http://www.tycoelectronics.com/customersupport/rohssupportcenter/pdf/tyco_lf_customer_packet_whiskers.pdf) foisonnant de macrophotographies.

Ce qui fait dire au blogeur de Ha.cker qu’il s’agit là d’une raison supplémentaire pour justifier une redondance de la plupart des équipements sensibles ou stratégiques. Ce n’est malheureusement pas une solution dans ce cas précis et cela prouve combien il est souvent difficile de traduire en termes simples des problèmes matériels à des hommes du logiciel. Lesquels à leur tour tenteront d’appliquer une parade purement « logicielle » ou « logique » à une question qu’ils ne maîtrisent pas toujours. Car ces moustaches ne sont pas le fruit d’un hasard. Elles sont généralement la conséquence d’une mauvaise maîtrise des températures de refusion (les « cartes électroniques » ne se soudent plus à la vague ni au fer à souder, mais au four). L’on peut également mentionner quelques autres éléments déclenchant, telle qu’une jonction métal-métal particulière (cuivre-étain étant la plus courante) ou encore un stress mécanique de la surface étamée. Dans de telles conditions, la probabilité de voir se développer des écheveaux de métal générateurs de court-circuit est loin d’être nulle. Et, pis encore, l’on ne connaît que très peu de traitement de surface efficace pour éviter cette prolifération. Le nickel peut améliorer les choses, sans parler d’un retour aux alliages polluants contenant du plomb (encore toléré dans les équipements professionnels de radiocommunication et les électroniques embarquées et spatiales… pour cette raison précise).

Pourquoi l’idée de redondance ne peut-elle en aucun cas résoudre le problème des « moustaches » d’étain ou de zinc ? Tout simplement en raison de la reproductibilité des processus industriels. Si un four à refusion déréglé génère un défaut de fabrication des soudures, ou si une partie de l’assemblage est effectuée « hors norme », il est pratiquement certain que le défaut frappera toute la série sinon toute la chaine de production… comme les moustaches procèdent d’un phénomène physico-chimique, les probabilité de reproductibilité de pannes simultanées sont dont plus que probables. La redondance parfaite pourrait-être obtenue avec un équipement équivalent d’une autre marque, mais cela est rarement possible, notamment en matière de routage/commutation.

Mais est-il nécessaire de s’alarmer ? si, au début des années 2000, lorsque les premiers équipements « sans plomb » sont apparus, les procédés de soudure par refusion étaient encore mal maîtrisés, et les nouveaux alliages de brasure encore quasi-expérimentaux. Une période qui a coûté la vie à quelques satellites et provoqué pas mal d’étincelles inexpliquées dans les salles informatiques. Le cas est plus rare de nos jours. Et s’il faut, par mesure de sécurité, envisager une redondance des équipements stratégiques d’un département IT, il n’est plus très sérieux de le faire pour des raisons de poils métalliques. Il est en revanche particulièrement important de vérifier, lors des opérations de réparation et de maintenance, que le changement d’un composant soit fait soit avec une « bonne vieille » soudure à l’étain-plomb-argent, ou soit faite avec une station à air chaud et un opérateur capable de maîtriser les règles d’une bonne brasure.

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